Varices, jambes lourdes ou en poteau : que faire en été ?Istock
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Les problèmes de circulation sanguine au niveau des jambes sont présents toute l’année, mais la chaleur aggrave nettement les choses. Le Dr Paul Pittaluga, chirurgien vasculaire et président-fondateur de Paris Veine Institut a accepté de répondre à nos questions et va vous éclairer sur les principales problématiques circulatoires en été et les solutions efficaces.

Medisite : Pourquoi les femmes en particulier souffrent-elles de jambes lourdes en été ?

Dr Paul Pittaluga : Si les femmes souffrent plus de jambes lourdes que les hommes en été, c’est à cause des hormones, ce qui explique que la grossesse, période où les hormones grimpent en flèche, soit une période à risque. Notons que toutes les femmes n’ont pas la même sensibilité aux hormones, mais certaines, plus sensibles, ont mal aux jambes en début de chaque cycle ! Globalement, les femmes souffrent plus de problèmes de gonflements et de jambes lourdes ou douloureuses, car elles ont plus de récepteurs à la surface des veines. Elles répondent donc plus facilement à la congestion qui se traduit par un inconfort, des douleurs diffuses sur toute la jambe, un gonflement, l’aggravation de varices… A cela s’ajoute l’effet de la chaleur. Car le système veineux est un thermorégulateur, qui peut être “en surchauffe” rapidement quand les températures sont élevées. Pour les personnes qui souffrent d’insuffisance veineuse, l’été est souvent insupportable. La qualité de vie est nettement affectée.

Les femmes sont donc épargnées après la ménopause ?

Dr P.P : Ce n’est pas si simple. La baisse hormonale est effectivement favorable car la congestion est moindre. En revanche, le vieillissement entraîne une altération de la structure des veines. Ce qui explique que les personnes plus âgées ont plus de varices par exemple. Il ne faut pas oublier que près d’un tiers de la population souffre de varices, c’est énorme ! 17 millions de Français sont concernés par l’insuffisance veineuse, et pourtant nous n’en parlons que très peu. Alors que le vieillissement de la population, hommes et femmes confondus, va accentuer le problème.

Les "jambes lourdes" peuvent-elles cacher un problème plus grave ?

Dr P.P : Bien sûr, la chaleur fait gonfler les veines et peut expliquer les sensations de jambes lourdes et la congestion. Mais je recommande de faire un bilan car cela peut toujours cacher une insuffisance veineuse, surtout si le phénomène est nouveau et/ou dure dans le temps. Une veine abîmée ne se répare pas, et ce qui peut sembler normal en vieillissant et par temps chaud, n’est en réalité jamais anodin. Quand une varice apparaît, c’est un signe à ne pas négliger, car alors le système veineux ne peut plus correctement remplir son rôle et le sang ne remonte pas bien vers le cœur, les autres veines s’abîment, on risque la phlébite ou l’ulcère variqueux. Les jambes en poteau, c’est aussi une autre problématique qui doit être surveillée.

Les jambes en poteau, que voulez-vous dire ?

Dr P.P : On a tendance à confondre la congestion liée à un mauvais retour veineux avec une autre pathologie : les jambes en poteau. Ce sont deux choses très différentes, qui demandent une prise en charge spécifique.

Les jambes en poteau (lipoedème) miment les symptômes des jambes lourdes (avec en particulier une douleur à la compression) mais ont une origine différente : ce n’est pas un problème de liquide mais de graisses (sans qu’il soit question de surpoids). Les personnes qui souffrent de jambes en poteau ont souvent les chevilles effacées. Cela se soigne très bien avec un type de liposuccion particulier.

Quelles solutions médicamenteuses ou non médicamenteuses en cas de jambes lourdes ?

Dr P.P : Encore une fois, on ne peut que recommander de toujours commencer par un bilan pour déterminer précisément l’origine, la gravité et la meilleure prise en charge possible. Si le gonflement est simplement passager, trois gestes - que l’on peut combiner - s’imposent pour soulager :

  • Mettre les jambes en l’air, aussi souvent que possible.
  • Appliquer du froid (jet sous la douche, gel à placer au réfrigérateur).
  • Masser, pour stimuler les fonctions de drainage. Attention, ce massage doit être doux, le palper-rouler par exemple est contre-productif.

Parallèlement, il faut proscrire la chaleur (sauna, hammam, douches ou bains chauds), qui aggrave notablement les troubles de la circulation.

En cas d’oedème lymphatique ( les pieds et les orteils sont gonflés), le drainage lymphatique manuel chez le kinésithérapeute donne de bons résultats, quand il est bien fait. Il faut compter une vingtaine de séances, à raison de deux séances par semaine.

Les veinotoniques enfin restent incontournables, même s’ils ne sont plus remboursés par l’Assurance maladie. Les plus efficaces sont ceux qui contiennent de la diosmine (le Daflon en particulier, qui a prouvé scientifiquement son effet veinotonique et anti-inflammatoire), ou des flavonoïdes ; le polyveinol, sous forme de complément alimentaire, est également une option.

Que penser des chaussettes ou bas de contention ?

Dr P.P : Ils aident, c’est indiscutable, calment les congestions et douleurs et évitent la progression de la maladie, même quand il y a des varices. Mais ils doivent être portés tous les jours et toute l’année impérativement. Ce n’est pas une solution pérenne.

Quand faut-il passer par la chirurgie ?

Dr P.P : Quand il y a apparition de varice. Et contrairement à ce que l’on a longtemps conseillé, il ne faut pas attendre d’en avoir plusieurs pour toutes les traiter en une fois. Plus tôt on agit, mieux c’est. Avec les techniques opératoires mini invasives dont nous disposons actuellement (méthode ASVAL) nous pouvons préserver le capital veineux, et notamment la saphène, cette veine essentielle que l’on enlevait de manière systématique auparavant, et encore aujourd’hui si le nombre de varices est élevé. Il ne faut pas se priver de cette possibilité car elle évite les récidives.

Sources

Entretien avec le Dr Paul Pittaluga.