
La France entière est traversée par une vague de chaleur extrême depuis plusieurs semaines. Un phénomène qui s'accroît d’année en année avec le réchauffement climatique. Les fortes températures augmentent la surmortalité des plus fragiles. Mais au-delà des décès, font-elles vieillir plus vite ? Et bien, oui.
A lire aussi :
Canicule : comment faire face aux pics de chaleur ?C’est le constat inquiétant d’une étude publiée en février dernier dans la revue Science Advances par des scientifiques américains. « Les personnes âgées vivant dans des régions où les jours de chaleur extrême sont plus nombreux, ont vieilli biologiquement plus vite que celles vivant dans des régions plus fraîches », observent-ils.
Si le temps s’écoule de la même manière pour chaque personne, le processus de vieillissement suit un rythme propre à chacun. C’est ce qu’on appelle l’âge biologique. Il reflète l’état physiologique réel d’un individu et permet d’évaluer plus précisément les risques face aux pathologies du vieillissement. L’âge chronologique est, lui, déterminé uniquement par l’année de naissance.
Lien entre exposition à la chaleur et vieillissement biologique
Dans l’étude, les scientifiques se sont intéressés aux données génétiques de 3 600 participants aux États-Unis, âgés de 56 ans et plus. « Il s'agit de l'une des premières études à grande échelle à établir un lien entre l'exposition à la chaleur à long terme et le vieillissement biologique chez l'homme », explique au New Scientist, le professeur Eun Young Choi, de l’Université de Californie du Sud.
Les chercheurs ont estimé l'âge biologique de chaque participant à l'aide de prises de sang prélevées durant six ans. L’objectif : détecter les modifications chimiques qui régulent l’expression des gènes. Ces marqueurs évoluent au fil du temps et ces variations ont été associées à l’apparition de pathologies liées à l’âge.
Les données ont ensuite été comparées aux relevés quotidiens de températures enregistrés par les agences météorologiques états-uniennes, dans un périmètre restreint autour des domiciles des participants au cours des six années précédant les prélèvements sanguins.
14 mois plus vieux biologiquement
Résultat : « Les participants qui vivent dans des endroits où la moitié des jours de l’année sont considérés comme très chauds (avec une température supérieure à 32 °C), tels qu’à Phoenix, en Arizona, étaient jusqu’à 14 mois plus vieux biologiquement comparés à ceux vivant dans des endroits où l'on compte moins de 10 jours très chauds par an », indique dans un communiqué Jennifer Ailshire, directrice de l’étude et professeure de gérontologie à l’Université de Californie du Sud.
L'humidité accélère le processus
Mais la chaleur n’est pas le seul coupable. L’humidité joue aussi un rôle important. Lorsque celle-ci est élevée, elle empêche l’eau du corps de s'évaporer. Il est donc plus difficile, voire impossible, de transpirer. « Cette combinaison entre chaleur et humidité est particulièrement importante à prendre en compte chez les personnes âgées, car elles ne transpirent plus aussi bien que les jeunes et perdent donc en partie leur capacité à rafraîchir leur corps par l’évaporation de la sueur », déclare Jennifer Ailshire.
Le Dr Austin Argentieri, professeur à l’Université de Harvard et qui n’a pas participé à l’étude, relève auprès de New Scientist quelques limites à ce travail de recherche. « Elle n'a pas tenu compte de l'accès à l'air conditionné ni du temps passé par les participants à l'extérieur, ce qui pourrait modifier leur exposition personnelle à la chaleur. »
Les auteurs alertent sur le réchauffement climatique et sur l’impact que la chaleur à répétition pourrait avoir sur le vieillissement biologique. « L'identification des personnes les plus susceptibles de vieillir plus rapidement en raison de la chaleur extrême pourrait aider les décideurs politiques à élaborer et à déployer des mesures pour les protéger », conclut le Dr Austin Argentieri.