
Vous pensiez que danser en guinguette servait surtout à faire du bien au moral ? Vous aviez raison. Mais ce n’est pas tout. Selon une nouvelle étude publiée dans le European Journal of Psychotraumatology, bouger son corps en rythme, dans un cadre festif, pourrait aussi aider à guérir certaines blessures psychiques. Un effet inattendu, mais bienvenu. Et si la clé de votre mieux-être passait par une piste de danse, plutôt qu’un cabinet de psy ?
La danse, une thérapie qui ne dit pas son nom
On connaissait déjà les bienfaits du mouvement pour le corps. Mais ici, c’est la dimension psychique qui retient l’attention. La danse thérapie (ou Dance Movement Therapy, DMT pour les intimes) est aujourd’hui utilisée auprès de personnes ayant vécu des événements traumatiques : violences, accidents, guerre, deuils… L’étude révèle que cette pratique améliore la régulation des émotions, diminue l’anxiété et aide à restaurer l’image de soi. Concrètement, cela signifie que danser, sans forcément suivre une chorégraphie stricte, peut reconnecter une personne à son corps et à ses sensations, là où le traumatisme avait laissé un vide ou un blocage.
Cette efficacité repose aussi sur la manière dont la danse stimule simultanément plusieurs régions du cerveau : le cortex moteur, le système limbique (émotions) et l’hippocampe (mémoire). Peu d’activités physiques sont aussi globales. Et quand tout cela est activé dans un cadre bienveillant, le corps se remet doucement à faire confiance.
« Je ne pensais pas que ma première valse après la mort de mon mari aurait un tel effet. J’ai pleuré en rentrant chez moi. Mais pour la première fois depuis longtemps, ce n’étaient pas des larmes de douleur. »
Quand les mots ne suffisent plus, le corps prend le relais
Parler d’un traumatisme n’est pas toujours possible. Pour certains, c’est même impensable. La danse offre alors une voie alternative, où le langage verbal n’est plus requis. En bougeant, en se laissant porter par la musique, c’est le corps qui parle. Les tensions s’expriment, se libèrent, se transforment. Ce n’est pas magique, ni instantané, mais c’est un point d’entrée. Et dans un monde où tout va vite, cette reconnexion sensorielle agit comme un ancrage profond.
Jeannine, 72 ans, en témoigne simplement : « Je ne pensais pas que ma première valse après la mort de mon mari aurait un tel effet. J’ai pleuré en rentrant chez moi. Mais pour la première fois depuis longtemps, ce n’étaient pas des larmes de douleur. »
Et la guinguette dans tout ça ?
Justement, ce qui fonctionne si bien dans ces contextes festifs, c’est l’alliance entre mouvement libre, musique vivante et lien social. On danse sans jugement, sans objectif, juste pour le plaisir. Mais derrière ce plaisir se cache un vrai mécanisme thérapeutique : le rythme stimule les circuits de la mémoire émotionnelle, les interactions créent de l’ocytocine (l’hormone de l’attachement), et le corps se remet en mouvement après parfois des années de verrouillage.
Danser ensemble devient alors un acte de soin collectif. Et sans le savoir, la guinguette se transforme en groupe de soutien en plein air. Ce n’est pas nouveau : dans de nombreuses cultures, la danse a toujours été utilisée pour exorciser les douleurs, célébrer la vie après la perte, et faire lien. Ce qui change aujourd’hui, c’est que la science commence à en comprendre les rouages.
Danser en soirée, c’est aussi retrouver une forme de liberté intérieure. Ce moment où l’on oublie les diagnostics, les injonctions au bien-être, les pressions du quotidien.
Un pas vers la résilience
Ce que les chercheurs appellent le "post-traumatic growth", c’est cette capacité à non seulement se relever d’un choc, mais à en ressortir grandi. La danse, parce qu’elle est expressive, intuitive et enracinée dans le plaisir, favorise ce chemin de reconstruction. Elle n’efface pas le passé, mais elle redonne de l’élan. Et cet élan, c’est parfois une valse, une salsa, ou une simple improvisation dans une salle des fêtes. Le mouvement devient mémoire en mouvement, mais aussi perspective vers autre chose.
Une thérapie sans blouse blanche
Danser en soirée, c’est aussi retrouver une forme de liberté intérieure. Ce moment où l’on oublie les diagnostics, les injonctions au bien-être, les pressions du quotidien. On respire, on bouge, on ressent. Et quelque chose se passe. Parfois discret, parfois intense, mais réel. Et si la médecine conventionnelle a toute sa place, ces espaces de mouvement collectif offrent un complément précieux. Un endroit où l’on peut guérir autrement.
Il faut aussi le dire : danser ne remplace pas une psychothérapie, surtout lorsque le traumatisme est profond ou ancien. Mais pour beaucoup, c’est un point de départ. Un réveil. Une manière d’oser se remettre dans le flux de la vie.